« Vous prendrez bien un peu de craie ? » plaisante Geofrrey Orban en agitant un verre à la manière d‘un oenologue. Tout en analysant de manière sensorielle les saveurs du sous-sol des Chétillons, prestigieux secteur du Mesnil-sur-Oger, le responsable d’Educavin pointe du doigt les hauteurs des coteaux. « Il ne faut pas confondre le calcaire des falaises avec la craie sur laquelle poussent les vignes. Ca n’a rien à voir ! »
Subtilité de dégustation
L’exercice fait appel au cinq sens, principalement la vue en fonction des différentes couleurs des couches de sol ; l’odorat ; le toucher avec les textures des prélèvements ; mais aussi parfois le goût, quand il s’agit de déguster la craie ; et l’ouïe pour les réactions légèrement effervescentes après l’ajout d’eau.
A la demande des frère Bouret, propriétaires du champagne Pertois-Lebrun, et tandis que prend forme la première fosse sur la partie haute du lieux dit, Geoffrey Orban en profite pour commenter la topographie en fonction de la déclivité du terrain, des épisodes géologiques, de l’érosion…
Dans la courte tranchée, les horizons se dessinent aisément avec des colorations différentes du sous-sol, sans parler des textures. Goeffrey Orban énonce : « craie, limons argileux, couche de lessivage… Il y a des petits cailloux qui viennent du plateau. Nous sommes sur une veine de descente successive, et nous y retrouvons l’ancien sol. »
Le scientifique a pris soin d’installer une petite table et de se munir de récipients afin de réaliser ses prélèvements dans la fosse avant de placer des éléments dans des verres de dégustation.
« La craie, c’est très subtil à déguster ! Au nez, ici, il s’agit d’arômes mellifères. Elle s’avère grasse et crémeuse. Dans le vin, cela donnera un aspect floral. »
De haut en bas
Il ne manque pas de souligner que l’eau de pluie est toujours un peu acide, « et sur la craie cela attaque le minéral, sans compter l’impact des exsudats en provenance des racines. En fonction de la descente de celles-ci, il y a différents potentiels qui oscillent entre réduction et oxydation. », confie Geoffrey Orban.
L’exercice avec l’eau mêlée aux prélèvements permet de ressentir ce qui ce passe dans le sous-sol avec l’érosion et les exsudas des racines, on sait alors ce qui intègre la vigne.
Après le creusement de la seconde fosse en contrebas, Geoffrey rappelle que ce secteur fut conditionné par les intrusion marines. La mer était là et a généré le dépôt des cocolythes, ces organismes végétaux qui sont à l’origine des éléments utilisés par les vignes, nos végétaux contemporains. La craie y est bien différente, plus originelle, avec un impact différent sur le développement des raisins. »
De haut en bas, toutes ces observations permettent de déterminer les potentiels pour certains types de vins, champagnes ou coteaux champenois. Cela induit bien entendu des approches différentes de vinification. De précieuses informations pour les vignerons à l’image des frères Bouret afin d’élaborer les belles cuvées du champagne Pertois-Lebrun.